En suivant le sentier en balcon, rejoindre le Guil naissant après avoir franchi plusieurs petits ruisseaux. Le traverser à gué (2450 m) et après quelques lacets arriver au lac Lestio ( 2510 m). Remonter un sentier en lacets puis direction sud est, sous la crête de la Pointe Joanne, continuer jusqu'au col Valante ( 2815 m), col frontière.
(Marc Buisson, CDRP 05)

Entre schiste vert et gneiss rosâtre, cette étape transfrontalière pénètre dans le monde minéral mythique du mont Viso, plus haute sentinelle des Alpes-du-Sud (3841 m). Au sud du refuge du Viso, structure vaste et moderne réhabilité en 2003, le sentier s’engage sur les prairies d’alpage sur lesquels se côtoient tant bien que mal loups et troupeaux de moutons. Les drailles quadrillent ces pelouses irriguées naturellement de toute part. Le torrent central trouve sa source au lac Lestio et s’amplifie ensuite pour devenir le Guil.
La montée au col Valante, passage entre le parc régional du Queyras et lePiémont italien, s’effectue dans un cahot de schistes sombres et de névés quasi permanents. Le col est un point d’observation incontournable des bouquetins (réintroduits dans le Queyras entre 1995 et 1998) qui viennent y racler les lichens des rochers. C’est ici que surgit parfois la nébia, brouillard épais et humide en italien. Il recouvre alors les tapis de gentiane de Koch, bleu roi et les fleurs d’arnica jaune d’or.
Les vallons du Piémont s’étalent au sud, la roche passant du vert côté français au rose en Italie.
La pyramide de pierre mythique par sa taille et sa forme du mont Viso est un vestige de l’émergence des Alpes. Les marnes et sédiments accumulés en ce lieu lorsqu’il était encore océan furent soulevésés en hauteur lors de la collision des deux plaques tectoniques de part et d’autre du « rift alpin » (fissure sous-marine provoquée par le glissement des plaques). Ils constituent les sommets d’altitude moyenne de la région, car déjà en grande partie rabotés par l’érosion. Toutefois, des magmas profonds se sont aussi échappés de ce rift, et plus résistants, ce sont eux qui offrent aux alpinistes les sommets les plus vertigineux du massif, dont le Viso est le plus emlématique. Actuellement la roche qui y est visible est un composé d’ophiolites, lave typique de ces rifts anciens, roche verte à base de basalte (roche volcanique) et gabbro, de gneiss (roche métamorphique) et de sédiments. Ces particularités géomorphologiques en font un sujet d’étude prisé et sa forme impressionnant alimente nombre de mythes et légendes.
(Sara Zeidler, Gilles Chappaz, Grande Traversée des Alpes)